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Brièveté du muguet
causée par les soupirs
du monde.
1966
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J’ai faim
se dit la première fourmi
et la colonne se mit en branle.
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Entre deux courants d’ère
on peut entendre
la couleur du Vide.
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La Lune,
patiente,
contemple notre folie.
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Après l’arbre en fleurs,
des queues de cerises
à être malade tout l’été.
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Le pinceau
malmène ses doutes
jusqu’à l’envol.
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Le manche du couteau
cherche son chemin
plus loin que la confiture.
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Les poches vides,
le cœur plein,
équilibre.
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Un trou dans le toit.
Ouf !
Mon âme respire.
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Un bambou sert de canne
Deux bambous servent de baguettes
Trois bambous, c’est un de trop.
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Chaque saison
transforme
le paillasson.
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Le chat observe l’araignée.
Il ne connaîtra jamais
l’océan.
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Le cri du cochon
couvre celui de l’homme.
L’éphémère a raison.
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Les roses discutent entre elles :
pas de racisme
au bout des racines.
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La fourche
suit le mouvement de la taupe
mais ne gagne rien.
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Les pavots vont par trois,
le printemps appelle
la connaissance.
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Derrière la montagne,
une autre montagne
à contempler.
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Le corbeau
décore la prairie neigeuse ;
dialogue du vivant.
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L’odeur d’un moucheron,
il faut changer l’ampoule
pour que les jours passent.
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Le balai de la maison
ne sert à rien,
la poussière est propre.
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Une tasse blanche,
un bol bleu,
le thé vert s’en fiche.
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Le vent fait parler les volets.
Quelle joie de devoir
entendre frapper.
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Ce vase dessine
le parfum des roses.
Bouquet maternel.
1966
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Un thé chasse l’autre.
La belle saison donne soif
à l’ombre des degrés.
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L’hiver, on rêve de l’été ;
l’été, on ne pense plus.
Injustice du mot.
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Le soleil ne bouge pas,
le chat, pourtant, le suit
pour aller mieux.
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La roseraie épouse le calendrier
du jardinier confiant.
Elle lui survivra.
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Assis sur un bout de banc,
face à la Bourse,
l’Occident cherche sa dignité.
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Sur la colline
les couleurs en fleurs.
Apaisement de l’iris.
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L’expression est une impulsion
nulle besoin d’être pensée
sauf à vouloir mentir.
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Le même jour m’entraîne
dans sa folle décision
de traverser le destin.
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Suggérer l’intuition
de n’être rien du tout,
mais dans le tout.
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La cigale écoute le paysan
creuser un puits
pour arroser son courage.
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La pluie et le vent
font bon ménage
car le vent ne rouille pas.
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Ivre de circonférence,
la Lune mène en bateau
les marins de l’enchantement.
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Ici ou là,
le principe de l’amitié.
Invisible.
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Le cœur de la neige,
aussi épais que la joie
du pas ralenti.
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Une flopée de mouettes
surveille le sillage
en réveillant l’aube.
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La mouche tourne en rond ;
elle fait le tour de la question
sans limites.
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Le chat a le choix
de dormir ou de dormir ;
appelons un chat un chat.
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L’harmonie est le souffle
le plus authentique
du chaos.
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Un poème organique
coule depuis ma tempe,
le pouls plein d’encre.
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Respirer par la Lune,
bouche bée,
mois après mois.
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La douleur du survivant
a le droit de grimacer
dans le dos du clown.
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Trois fruits en sommeil,
le compotier détient la vérité.
Peut-être.
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Soudain,
la respiration du poète
prend la forme des nuages.
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Une plume vole
devant les pieds du rêveur :
rencontre.
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Une mouche dort
dans mon mouchoir ;
je me moucherai plus tard.
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La nuit, on fait des rêves ;
mais le jour, on rêve encore plus,
tellement plus.
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Au royaume des désœuvrés,
l’ennui donne des chasses
à courre d’idées.
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Le paysage de l’esprit
est une jungle
où les clairières sont rares.
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Oublier que l’on sait ;
à la lumière de la légèreté
s’appliquer à vivre.
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Le sillage de toute quête
trace le son de l’horizon
pour s’abandonner.
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Dans le lit du trait,
l’encombrant
devient fuite d’ombres.
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Nourrissons la patience,
le cœur rejoint l’âme
quand tout nous désarme.
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Le banc a disparu,
un bout de conscience
l’a remplacé.
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1966
Haïkus du Bout du Banc © 2003 Textes protégés, reproduction interdite.