L’essence de la beauté

La beauté est affaire de cœur, Affaire de toute vie, De la naissance de la question Au rêve le plus tangible. La laideur est affaire d’indécence, Seule affaire des hommes, De leur angoisse du Je Au partage de l’inconscience. La beauté se pose au-delà, Dans le mystère de son essence ; Elle se qualifie à…

Le tournis de la terre

  La Terre n’a pour vocation Que d’avoir été envoutée Au rythme de révolutions. Vortex auto-enfanté Sans repères feintés. La pulsation du Vivant Engendre le tournis, Car le temps d’ici N’a pas d’horaires. Le cosmos a-t-il une âme ? Se demande le mandala Attendant le souffle du hasard, Quand le soleil fatigué Aura rangé sa…

Sous le caillou le chaos

  La vérité, gênée aux entournures, cherche la paix de l’esprit complice. Le vœu pressant indispose l’âme pure Au front marqué d’interstices. Silence du caillou enfoui dans le sable léger comme le regard détourné. Vies et survies s’abritent et s’entrechoquent dans les méandres de l’invisible et du répétitif. Comme une épidémie d’instincts que bouscule le…

Kamikaze en moins

  Cette espèce m’arrache l’aveu D’un refus d’appartenance, Prisonnière du corps et de l’esprit Au déni à demi consommé. Ballottée comme un cerneau de conscience, Vomissant le hasard d’un grain de riz Confiné dans la norme échappatoire. Ô kamikazes du vivant, sans limites, Sans recul ni vision de votre finitude, Écartez-moi de toute ressemblance Et…

Parangon de parasite

  Le parasite colonisateur a repeint La terre sous toutes les coutures, Marqué la boule à zéro De son ego triomphant. Passe ton chemin, Univers La loi du Talion a dégénéré. Le vide résonne, fébrile Bouché par des intentions viles. L’odorat quitte l’élixir À l’aube du devenir. La division fausse la route Du parasite dépourvu…

Retour aux sources

Pour célébrer l’hiver entamé, un modeste retour aux fondamentaux en forme de boucle. Dès l’enfance, les mots m’ont servi à imager ce que mon esprit découvrait de la vie, ses visions, questionnements et ressentis. C’est avec surprise et sourire que j’ai retrouvé ce petit texte choisi par les fondateurs du second numéro annuel, édition 1975,…

Poésie intemporelle

Pour terminer l’année, je butine en me souvenant que le poète Sergio Solmi a écrit : « En poésie, on peut tout faire avec tout. » Voilà qui habille l’espoir du lendemain, rêvé la veille au soir. Sous l’humidité des peurs l’humus résiste, insensible au temps qui passe pour les trop-pressés. Sous la chaleur du soleil imposant,…

Quand Paris Rosnay

  À Marcelle. Le 19 décembre 2009, partait en voyage le poète Jean-Pierre Rosnay, figure de proue et fondateur du Club des Poètes. Dix ans déjà que les souvenirs respirent sa présence rue de Bourgogne, relayés par l’indéfectible sourire de Marcelle Rosnay, accompagnée du discret Blaise. J’aime beaucoup Rafales (1950). Mais c’est Fragment et Relief…

La lumière diffuse le mot…

…à moins que ce ne soit l’inverse. Le Lamparo est un cahier de poésie édité chaque été de 1979 à 1981. Le premier cahier a été imprimé à 350 exemplaires. Le numéroté 232, entre mes mains ce matin, me rappelle que la poésie n’a pas d’âge. Ni frontière, ni temps et surtout pas de case….

Paradis parallaxe

  Dans les cratères d’une mémoire éfilochée Virevoltent les couleurs d’un ancien monde. Quand les fleuves couraient librement Quand les arbres dansaient, insouciants Quand les lombrics travaillaient en silence. Dans le temps qui trouble les miroirs Le paradis a laissé une odeur de mirage Emboîtant le parallaxe du souvenir Aux illusions perverties. Ce soir il…

Le nectar de Char

Vous allez penser que j’insiste. Il se trouve que René Char est l’un de mes poètes préférés – parmi tous ceux que j’ai pu lire. Il n’est bien sûr pas le seul à trôner dans le haut de mon panier… Mais comment résister à ce petit livre bien rangé dans ma cuisine, passant inaperçu au…

De la constance du cirque

  Au cœur des circonstances, de la cupidité convenue, le courage peut crever, le cirque a liquidé les rêves dissonants. Constance du système quand les cavaleries contrent les circus redécorés dévorés de contradictions. Les mèmes de serpentines aux comptines en continu recouvrent les concerts, l’incuriosité s’acquitte de l’ambiance. Depuis les gradins le poète observe les…

Cher Char

Une définition est toujours personnelle et Char s’en charge ainsi : « La fonction de la poésie est de maintenir cet affrontement des contraires, d’en recueillir la souffrance et le fruit. » « Le poète transforme indifférement la défaite en victoire, la victoire en défaite, (…) Magicien de l’insécurité, le poète n’a que des satisfactions adoptives. Il convient…

Que les habitudes titubent

  Rai de soleil arrondi de silence Le dimanche casse la cadence, Le profit frôlant l’armistice Jusqu’au lendemain qui déchante Face aux immondices Enfantés par les temples Ouverts à toute amplitude. Laver la tôle de notre suffisance Qui en tête caracole, La finance menant la danse La liberté terminera dans la rigole. Ô poètes incorruptibles…

L’homélie d’Amélie

  Alors vint la tempête depuis l’ouest. Mais pour le poète qui voit sans boussole, La rose des vents n’est qu’une borne De chemin circulaire. Et le soleil intervient dans l’horizon Du petit matin aérien où Les vapeurs de la veille Encombrent l’espace. Le moment du jour subi Frappe de son cliquetis Et remet le…

Noir ou blanc, je souris au gris

  Le manichéisme ambiant m’arrache souvent un cri. Mais un cri de souris, c’est comme un trou de souris, Tout petit. L’horizon dépend du vent, de l’énergie, des courants, L’espace dépasse nos regards hagards Occupés à chercher des réponses. Le temps, sujet de ce monde frénétique En proie à détruire et à fuir en avant,…

Chusa ou l’art de ne pas chuter

  La folie est universelle Et tout le monde peut la rencontrer. Seuls les plus intelligents et sensibles La prennent à bras le corps ; Car il faut être courageux Pour fuir dans l’autre sens Dans cette supposée différence. Le formatage est universel Et tout le monde peut y succomber. Seuls les plus intelligents et…

La nature et le nanti

La nature anéantie Par le nanti de lui-même, Le bipède en transit De peur, s’accrocha À toute forme de lingot, Rechercha la puissance Le temps d’une fuite Détruisant l’essentiel À gogo. La nature et le nanti Ne purent se parler, Dans l’antichambre De l’esprit occulté Le mâle mû par l’angoisse Se trompa de survivance, Et…

Un monde anti-sphérique

Ce matin, je me demandais ce que je pouvais bien publier dans ce journal vaguement discipliné. Aspirant à une condition d’inspiration – même s’il ne faut rien attendre –, j’ouvre alors mon coffre à poésie et commence d’en sortir, un par un voire deux par deux, tous les recueils empilés. Rien à faire, tournant, retournant…

La discrétion comme seul bien

À un salon du Livre, au siècle dernier, mon regard choisit un petit livre posé sur une table. Détail. Depuis que je suis repartie avec ce recueil sous le bras, je l’ai toujours à portée de main. Il s’agit de « Mon humaine clandestinité », de Michel Reynaud. Moins d’une trentaine de poèmes, plutôt courts, dont la…

Les rêves vieillissent avec nous

Pessoa a une approche qui m’enchante car elle fait référence au rêve auquel il confère une place centrale, comme le faisaient d’ailleurs les Indiens d’Amérique. Ainsi écrit-il : « Vis ta vie. Ne sois pas vécu par elle.
 Dans la vérité et dans l’erreur, dans le plaisir et dans l’ennui, sois ton être véritable. Tu…

Sutton Breiding, surtout poète

Aujourd’hui, j’ai envie de parler d’un collègue, américain. Le poète G. Sutton Breiding (GSB). Nous nous suivons mutuellement depuis quelques années et je dois dire que ses créations me plaisent beaucoup. Bien sûr, il a un univers à lui bien particulier, mais qui résonne parfois à mon propre chemin de création : sa musique de…

Soufi Saâdi a dit

Gülistan, le jardin des roses, un classique que je retrouve entre les mains aujourd’hui. Et nul besoin de gants de jardinier pour y pénétrer. Les roses ici ne piquent pas. Le lecteur a seulement besoin de son cœur et de son âme. Saâdi, poète persan, a beaucoup voyagé, a beaucoup rêvé et beaucoup écrit. Son…

Quelques minutes d’infini

  Dans son recueil Fragments verticaux (traduit de l’espagnol par Silvia Baron-Supervielle), Roberto Juarroz présente quatre parties dont il me plaît souvent de relire la deuxième, intitulée « Presque poésie » et qui propose 205 textes. J’ai envie de partager ici les numéros 166 et 167 qui résument assez bien l’ambiguité de toute position artistique, pour peu…

Tragédie grégaire

  Vide-ordures océanique de l’homo erectus Traversé, exploité, en chalut ou pedibus, Depuis la plage, l’usine ou la décharge ouverte. But intentionnel qu’une mer en soit recouverte. Les particules de plastique sont le meilleur carburant Du processus d’auto-destruction du prédateur vivant. Qui ne voit, qui ne sent, qui n’entend rien, Sourd à sa propre panique…